Quel choix pour quelle pratique pour les enfants atteints d’Autisme?

La diversité des prises en charge proposée dans le traitement de l’autisme infantile, discuté lors de la précédente chronique, soulève un certain nombre de questions pour les parents concernés. La principale d’entres elles est certainement celle de la difficulté liée aux choix de la méthode, dans un contexte de débats à forte connotation théorico-pratique. La raison de cette vision intégrative dans les soins apportés, pour mémoire, se fonde sur l’hétérogénéité des profils cliniques relative à la diversité de la symptomatologie du spectre autistique.

Récemment un colloque sur les avancées de la recherche dans le domaine de l’Autismea étédonné à l’Institut Pasteur le 29 septembre 2012, organisé par la fondation Autisme et animé par Pascale Paturle, responsable du mécénat Santé/Handicap à la Fondation Orange.Les conférences des experts, très richesau niveau du contenu informationnel, laissaient néanmoins sous-entendre l’importance de la complexité de ce trouble du développement et du fonctionnement cérébral.La communauté scientifique valide la présence de plusieurs facteurs « étroitement associés ou corrélés à l’autisme »1. En quoi ces avancées scientifiques peuvent elles éclairer notre pratique auprès des parents en attente d’une aide externe?

Lors de la Rencontre Régionale de l’Autisme donnée au forum des images le27 septembre 2012 animée par Saïd ACEF2,les Recommandations des bonnes pratiques professionnelles de la HAS (Haute Autorité de Santé) et de l’Anesm (Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux) ont quant à elles validées certaines avenues. Ces recommandations ont notamment mis de l’avant le potentiel des interventions personnalisées, globales et coordonnées, fondées sur une approche éducative, comportementale et développementale afin de répondre à ce trouble du fonctionnement cérébral.

Ces derniers évènements d’actualité dans le domaine de l’expertise sur l’Autisme m’amène toutefois à me questionner sur la clarté des orientations thérapeutiques du traitement tant pour les professionnels que pour les parents concernés?

Malgré ces recommandations, la réalité du terrain révèle des difficultés pour les familles, non pas uniquement concernant le choix d’une méthode de rééducation mais aussi le choix du professionnel expert dans la mise en œuvre de ces méthodes spécifiques. Les acteurs et encadrements restent multiples. Parmi les professionnels, nous pouvons citer principalement les éducateurs spécialisés, accompagnateurs psycho-éducatifs et psychologues intervenant dans un établissement spécialisé, un service d’accueil ou exerçant en libéral. Les divers acteurs-experts ou structures de traitement proposés aux parents d’enfants atteints d’autisme engendrent une confusion, plus précisément lorsqu’il s’agit de faire appel à une intervention à domicile.

À titre de professionnel, j’ai notamment fait l’expérience d’interventions dites psycho-éducatives dans le cadre d’un accompagnement à domicile. De façon légitime, nous pouvons se questionner sur le sens attribué à la terminologie de « psycho-éducatif ». Est ce une intervention de type soutien scolaire ou plutôt un accompagnement dans les démarches éducatives entreprises auprès de l’enfant ? En réalité, cette profession, très en vogue, peut faire l’objet de malentendus face aux attentes des parents et des soins relatifs à ce type d’accompagnement.

(found on http://lightbox.time.com)

« Ce nouveau métier qui nécessite une formation de base en psychologie consiste à accompagner des enfants et des adolescents avec autisme et troubles envahissants du développement à domicile ou à l’école afin de leur permettre de bénéficier d’une scolarité, ou bien des adultes dans les entreprises pour leur permettre d’exercer un métier » (Jean-Louis Adrien cité par J. Secondi, 2010, le nouvel économiste.Fr).
Devant ce marché du service à la personne en pleine expansion, quel est l’impact sur les professionnels intervenant dans le champ de l’Autisme?

Que l’on soit psychologue spécialisé ou non dans l’autisme, étudiant en psychologie, accompagnateur psycho-éducatif diplômé ou seulement expérimenté, le recrutement est le même (salaire et missions). Les psychologues diplômés recrutés pour ces postes d’accompagnement psycho-éducatif se voient ainsi intervenir là où des étudiants de licence en psychologie sont recommandés aux parents pour assurer le suivi de leur enfant. Hors il me semble fondamental de faire un rappel sur l’importance d’être formé aux approches thérapeutiques personnalisées et combinatoires (sensorielles, moteurs, cognitives, sociales et émotionnelles) afin d’assurer un développement dans tous ces aspects fonctionnels vers l’autonomie de l’individu. Au delà des méthodes de rééducations employées par le professionnel, il est indispensable qu’il puisse détenir une expertise clinique et une connaissance de l’enfant neuro-typique et atypique pour intervenir dans le champ de la psychologie de la personne. D’autres parts les missions d’un psychologue sont bien distinctes de celle d’un accompagnement psycho-éducatif ou éducateur spécialisé puisque ce dernier encadre, supervise et forme les accompagnants et/ou parents aux outils psychopédagogiques recommandés par la HAS.

Face à la pénurie d’un personnel formé et les récentes restrictions budgétaires dans le domaine du médico-social, une demande accrue se tourne vers les professionnels qualifiés sur le sujet, comme les psychologues formés à l’intervention de l’accompagnement de personnes en situation de handicap.

Actuellement des structures d’accueil limitent l’embauche de professionnels formés, laissant les familles dans l’impasse: soit elles s’entourent d’un spécialiste qui est contraint de répondre aux exigences des familles et exécuter des interventions hors de leur profession (AVS ou soutien scolaire pour un psychologue) ; soit les familles multiplient les intervenants sans partenariat avec les diverses figures professionnelles. Bien que cette deuxième issue reste selon moi intéressante par son approche variée. Les parents doivent faire preuve d’un regard très attentif face à cette diversification en terme d’intervention auprès de personnes atteintes d’un TED et s’assurer d’une certaine cohésion.

Ce phénomène sociétal pose une question de fond, celle de la responsabilisation de chaque partenaire actif dans l’intervention des personnes avec TED, pouvant engendrer une confusion dans la portée du rôle, des soins et des pratiques de chacun, parent et professionnel. Je reste néanmoins convaincue que la nature de la prestation de chaque professionnel se doit d’être clairement définie dans le but fondamental de répondre aux besoins structurants qui assisteront l’enfant dans l’organisation de sa pensée.

Elise Coussot
(Ms. Psychologie spécialisée dans le développement de l’enfant et de l’adolescent Université Paris 8-Université Aix-Marseille).

1. Tardif, C., & Gepner, B (2007) L’Autisme, 3ème éd., Armand Colin
2. Directeur du réseau de santé Aura 77