La parité au gouvernement Hollande fera-t-elle progresser le droit des femmes ? (1)
Le premier gouvernement Ayrault a été largement salué comme étant celui de la parité. Un chiffre parfaitement équilibré : 17 femmes ministres face à 17 hommes. La parité dans un gouvernement en France ? D’aucuns ont crié à l’événement historique tant il est vrai que notre pays est plutôt conservateur en la matière ; et ce ne sont pas les élections législatives de juin 2012 qui permettront d’infléchir cette tendance…
Mais, à y regarder de plus près, la révolution est moindre que ce que l’on pourrait penser… Au-delà de son strict aspect numérique, cette parité est peut être moins historique qu’elle n’en a l’air.
En effet, la répartition des rôles ministériels assigne hommes comme femmes à leurs domaines de compétences traditionnellement liés à leur sexe. Cette parité reproduit trait pour trait une théorie sociologique bien connue qualifiant les hommes de breadwinner (l’homme gagne-pain) et les femmes de female carer (celle qui prend soin). Cette grille de lecture permet de mettre en perspective une division sexuelle des tâches qui sévit dans le couple, une division qui n’est d’ailleurs pas sans cacher une hiérarchie entre les hommes et les femmes. Ces dernières sont assignées à la sphère du domestique, à des rôles de soins, de maintien de l’équilibre au sein des familles mais aussi d’assistance aux plus faibles ; les hommes eux voguent à l’extérieur du domicile et gagnent de quoi faire vivre les familles et les protéger des agressions extérieures en leur offrant un toit.
Ce gouvernement est de ce point de vue une parfaite illustration de cela : chacun(e) reste confiné dans les cadres traditionnels d’une hiérarchie ancestrale entre hommes et femmes. Aux hommes la les conquêtes économiques, financières, la défense du territoire, les relations internationales, le travail et le redressement… Aux femmes, le soin, la solidarité, la justice, les personnes handicapées, les droits des femmes, les affaires sociales et les jeunes. Sur 17 femmes, 14 se sont vus attribuées des ministères liés à cette fonction traditionnelle de « female carer ». Sur 17 hommes 15 sont dans des postes correspondant au modèle du breadwinner.
Autant dire qu’il reste difficile d’avoir dans les plus hautes sphères de la politique à la fois des femmes dans des postes moins traditionnellement « féminins » – comme ce fut le cas d’une C. Lagarde ou d’une M. Alliot-Marie – et en même temps une parité numérique.
Dans tous les cas, le gouvernement Ayrault prouve qu’il y a numériquement assez de femmes pour constituer des gouvernements paritaires, celui de Fillon à ses débuts prouvait qu’il y avait des femmes pouvant occuper des domaines moins classiquement féminins.
Dans tous les cas, ces deux gouvernements cumulés ne donnent plus aucune excuse à qui que ce soit pour dire qu’il est impossible de remplir les lieux du pouvoir au féminin…..
Virginie Martin
Politologue, Présidente du Laboratoire Politique – Think Tank Different
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