Insolite ! Le mouvement punk féministe

By October Hyde — juin 11, 2012

 

 

Girls, start the Revolution !” scandent-elles avec rage en s’emparant de la scène. Avec leurs couettes de petite fille et les « Whore » (« salope ») qui barrent leurs poitrines, les punkettes du mouvement Riot-Grrrl s’imposent comme les porte-paroles d’une génération de filles déchues. Des filles qui ne trouvent pas leur place dans la scène Underground  du moment, agacées de devoir écouter inlassablement les problèmes et désirs de la gente masculine sans pouvoir exprimer les leurs. Des filles qui, en dépit de l’époque et de ses soi-disant avancées, se voient toujours dans l’obligation de subir une société profondément misogyne et qui  s’en insurgent. Des filles qui ont décidé d’agir.

 

Au cœur des années 90 et de ses coups d’éclat, les féministes Riot-Grrrl ont compris que rien ne leur sera ni offert ni donné, que leur place au sein de la société, elles l’obtiendront en se battant et en se montrant inébranlable face à leurs détracteurs. Alors elles forment des groupes, jouent des coudes pour se retrouver à l’avant de la fosse aux concerts, peignent des banderoles et revendiquent leurs droits dans des Zines qu’elles distribuent aux conventions et festivals. Parce que, elles en sont conscientes, à chaque fois qu’elles ouvrent la bouche, saisissent un stylo, ou font gronder leurs guitares, la Révolution féministe est en marche ….

 

Contrairement à d’autres mouvements à l’instar du Punk dont la date d’apparition peut être clairement définie, le Riot-Grrrl a connu des débuts flous à travers les années, avec des artistes comme les Runaways (groupe culte dont est issue la célèbre Joan Jett) ou les Slits. Elles ouvrirent une brèche dans la culture underground qui, à ce moment-là, ne jurait que par les Clash ou encore les Sex Pistols, et si elles ne marquèrent que faiblement les esprits des auditeurs lambdas, ce sont à elles que nous devons les esquisses du « féminisme punk ». Néanmoins,  il faudra attendre les années 90 pour que la ville de Seattle devienne le théâtre d’un déferlement de révolte féministe.

 

A l’époque, les médias commencent petit à petit à s’intéresser à la gente féminine d’une différente manière. Au lieu de laisser les jeunes femmes évoluer dans le rôle décoratif et superficiel dans lequel ils les avaient initialement placées, ils commencent à s’intéresser à leurs émotions, bonnes comme mauvaises (la radio KAOS, qui proposa en 1991 une émission de radio destinée aux jeunes femmes en colère), à leurs envies (l’article « Women, sex and rock and roll » du magazine Puncture, publié en 1989) et aux problèmes tabous auxquelles elles sont confrontées (comme la revue Sassy qui offrit un dossier alors novateur et très complet à ce sujet en 1987). A Seattle, le Do it Yourself, mouvement qui prône la créativité, engendre une pléthore de nouveaux groupes et de fanzines faits main. Parmi eux se distingueront les revues féministes, qui permettront non seulement aux femmes d’exprimer leur rage mais aussi d’échanger leurs points de vue sur divers thèmes socioculturels.

 

Tobi Vail, Kathleen Hannah et Molly Neuman font partie du lot de rédactrices qui se détacheront du reste. Ce sont  elles qui trouvent le terme Riot-Grrrl en alliant la phrase d’une amie journaliste de Molly Neuman (« We need to start a girl riot ») et l’expression de Tobi Vail « Angry Grrrl ». Par la suite, leur dévouement à la cause féministe engendrera deux groupes phares du mouvement : Bikini Kill et Bratmobile.

 

 

Bikini Kill, le plus connu, a été formé par Kathleen Hannah (ancienne strip-teaseuse) et Tobi Vail (que l’on connait également pour sa relation amoureuse avec Kurt Cobain qui inspirera la chanson Lounge Act). Totalement ancrée dans le milieu antisexiste auquel elles avaient donné naissance à coups d’hymnes à la révolte (Rebel Girl) et de Zines, elles encouragèrent les jeunes femmes à jouer des coudes pour être en première ligne aux concerts et à adopter le silence médiatique, convaincues qu’une médiatisation excessive du mouvement le pervertirait. Après avoir sorti trois albums et un EP, elles se sépareront en 1998, mais leurs carrières seront loin d’être finies, puisque chaque membre ira faire de la musique de son côté.  Kathleen Hannah notamment rejoindra Le Tigre, un groupe un peu plus électro très engagé politiquement.

 

Bratmobile, quant à lui, est né à l’université de l’Oregon, grâce à Allison Wolfe et Molly Neuman. Ces dernières tenaient la revue Girl Germs et écrivaient quelques chansons interprétées à capella jusqu’au jour où elles trouvèrent un généreux donateur, Robert Christie, qui leur prêta des locaux et des instruments. Anecdote amusante, le jeune homme leur suggérera d’écouter les Ramones pour s’imprégner de leur musique et elles décideront de ne pas suivre ce conseil pour donner un son différent à leurs compositions. Un premier album sortira, « Pottymouth » en 1993, puis le groupe se séparera avant de se reformer quelques années plus tard, en 1998, pour créer deux autres albums, en 2000 et 2002.

 

 

Et maintenant, que reste-t-il du Riot-Grrrl ?

Si le mouvement se fait bien plus discret, il ne faut pas voir ça comme une défaite mais plutôt comme une acceptation des jeunes femmes dans le milieu Punk. Beaucoup plus de femmes osent rejoindre des groupes, certaines formations reprennent du service, et un grand respect semble régner entre la plupart des groupes, quelle que soit leur nature. En somme, les leçons transmises par les punkettes du Riot-Grrrl ont été retenues, et leur relève est assurée, aux Etats-Unis par exemple, avec Civet ou encore Spinnerette.

 

Chez nous, en revanche, la scène mérite d’être quelque peu dépoussiérée. Amies françaises, êtes-vous toujours prêtes pour faire la révolution ?

October Hyde

A propos de la Wonder

Leave A Reply

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>

Sondage

Le Ministère de la Femme change-t-il les choses ?

View Results

Loading ... Loading ...

La Femme du Mois


LA FEMME DU MOIS D'OCTOBRE
Qu’elles soient ordinaires, extraordinaires, passionnées, seules, en couple, timides, fêtardes, intelligentes, geeks, drôles…. Chaque femme a le droit d’être mise dans la lumière.
Retrouvez chaque mois LA FEMME de chez Wonder dans une interview exclusive !

Devenez Fans !